La Clean Beauty est-elle anti-science?

Débat: La Clean Beauty est-elle anti-science?

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En tant que littéraire de formation, j’ai du mal à résister à une bonne question “bac philo” 😆 Je n’ai donc pas pu m’empêcher de rajouter mon grain de sel sur le débat du moment sur Instagram: “La Clean Beauty est-elle anti-science?

Ce mémo m’a été inspiré par le post d’un de mes comptes favoris sur Instagram, @theecowell. Elle a même publié une vidéo sur YouTube dans la foulée sur le sujet, avec 4 autres instagrammeurs, que j’ai trouvé également très intéressante.

Et j’ai donc eu envie de participer aussi!



La Clean Beauty est-elle anti-science?

Tout d’abord, commençons par le commencement, à savoir la définition de la science (selon Le Larousse): 
“La science est l’ensemble cohérent de connaissances relatives à certaines catégories de faits, d’objets ou de phénomènes obéissant à des lois et/ou vérifiés par les méthodes expérimentales.” 

La science est donc un procès d’objectivation rationnelle du réel qui implique à la fois l’observation, la rationalité, la rigueur, l’universalité…Le tout sur la base de la documentation et de l’expérimentation.

En plus simple, la science observe, étudie, émet des hypothèses, expérimente, déduit et se confronte aux autres résultats pour tenter d’expliquer des phénomènes. 

On parle d’ailleurs de “consensus scientifique” qui correspond à une position collective de personnes de la communauté scientifique sur un domaine particulier d’études. Le consensus est en général basé sur la méthode et l’argumentation scientifique. Il implique un accord général mais pas forcément à l’unanimité. 

La science est donc toujours ouverte à la révision car elle est non dogmatique
Je rappelle qu’un dogme est une affirmation considérée comme incontestable, ce qui, on l’a vu, est contraire à la définition même de la science 😉

Voyons maintenant la définition de la “Clean Beauty“.

Officieusement (attention, “officieusement” est vraiment le mot clé ici!), la “Clean Beauty” est le fait de privilégier certains ingrédients par rapport à d’autres dans les formules de produits cosmétiques, car ces derniers ne seraient pas assez “propres/clean/green” (rayez la mention inutile). Dans certains cas, ces ingrédients sont même décrits comme “inutiles”, “controversés”, “polluants”, voire même parfois “toxiques” pour l’organisme. (ça vous fait penser à du marketing de la peur? C’est normal 😆)
En général, il y a également en sous-jacent l’idée que les ingrédients d’origine naturelle seraient plus “sains” et plus “sûrs” dans une formulation cosmétique (cette idée ne repose d’ailleurs sur aucune réalité scientifique, soit dit en passant).

Le problème, c’est qu’il n’y a pas de définition officielle des ingrédients considérés comme «propres/clean», pas de consensus si je puis dire, et certainement pas d’un point de vue scientifique.
En réalité, les seules définitions qui existent semblent provenir des marques elles-mêmes et changent en fonction de la personne à qui vous parlez (ou plutôt, devrais-je dire, à qui vous achetez).

Et pour moi, la littéraire de formation, j’ai l’impression qu’une partie du débat se situe donc plutôt du point de vue du vocabulaire utilisé.

La cosmétique en elle-même est et sera toujours une discipline scientifique, qui se base sur la méthodologie scientifique pour sélectionner les ingrédients qu’elle inclut dans ses formules de produits.

Or, la “Clean Beauty” est un concept qui n’a pas été créé par des scientifiques, mais bien par des communicants (le service marketing des marques cosmétiques). 

Il n’est donc pas rare d’assister à un gros débat sur le vocabulaire le plus approprié pour qualifier des ingrédients entre les équipes marketing et le service Recherche & Développement (R&D) d’une même entreprise. Et cela peut d’ailleurs créer beaucoup de frustration.

Les équipes marketing sont en général très motivées par la tendance de la “Clean Beauty”. Une nouvelle tendance à laquelle les consommateurs répondent si bien, c’est toujours super excitant pour des responsables marketing! 
Alors que de leur côté, les chimistes du service R&D qui connaissent les réelles propriétés des ingrédients ont souvent du mal à adhérer à cette argumentation parfois simpliste et anxiogène, qui ne repose pas vraiment sur un consensus scientifique classique mais plus sur une volonté de communiquer différemment sur les ingrédients.

Les chimistes cosmétiques peuvent cependant être motivés par le challenge de remplacer certains ingrédients par d’autres dans une formule. Ça peut clairement être un vrai défi scientifique ! Mais la raison pour laquelle il faudrait remplacer un ingrédient par un autre plus “propre” ne fait pas toujours sens, scientifiquement parlant. En chimie, il n’y a pas de “bons” ou de “mauvais” ingrédients ; ils sont plutôt caractérisés par leur fonction, leur concentration, l’exposition (= la quantité que vous utilisez chaque jour), leur affinité avec les autres ingrédients dans une formule…

Bref, à mon avis, tant que le terme de “Clean Beauty” n’aura pas de définition officielle et ne sera pas régulé, ce débat continuera à faire rage.

J’espère vraiment que si cette nécessaire discussion sur la définition de la “Clean Beauty” a lieu, les scientifiques spécialisés en cosmétique auront leur mot à dire sur le sujet. Car laisser des personnes qui n’ont pas de connaissances scientifiques décider seules de cette définition ne résoudra pas cette querelle, bien au contraire.

Et vous, avez-vous un avis sur cette question? Considerez-vous que la “Clean Beauty” est anti-science? N’hesitez pas à me donner votre avis dans les commentaires 🙂

NB: si vous voulez lire un article plus détaillé sur ma position sur ce sujet, j’ai écrit il y a quelques années celui-ci, qui va plus loin sur la question du vocabulaire de la “Clean-Beauty”, justement 😉

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Commentaires (6)

  1. Je pense à une marque comme Weleda qui a contribué à la diffusion d’un discours antiscience, antivaccin, antichimiotherapie, pro-anthroposophie. Rien n’est tout à fait anodin.

  2. Merci Bonnie pour ce sage éclairage, j’adhère au fait qu’il faudrait réglementer ce terme pour arêter les dérives. J’aimerais tellement que les pro sciences comme toi soient plus entendus auprès des acheteurs de cosmétiques. U’ mag féminin a fait un article récemment je crois, peut être un début ? En tous cas, tant qu’on n’aura pas de grande marque qui ose prendre la parole sur le sujet, rien n’avancera vraiment. Mais moi je n’en peux plus de me retrouver face à des vendeuses même en parapharmacie qui parlent de clean, de naturel, d’huiles essentielles… Au secours, on n’est pas des Plantes !!! (ceci dit je mange bio au maximum, parce que là ça a plus de sens !).

  3. Je suis à 100% d’accord avec Celine sur Weleda, et moi aussi je n’ai pas envie de donner 1 centime à cette marque.
    Quant à la “clean beauty” … rien que le mot clean en opposition à sale m’agace.
    J’utilise certains produits dits clean comme l’huile d’argousier de Pai que j’adore, et j’utilise des produits que d’autres qualifieraient de néfastes, dangereux, etc… . Je n’ai aucune réticence à utiliser ces derniers, car je sais que ces produits sont sûrs. Aux dosages utilisés ils ne sont absolument pas toxiques, perturbateurs endocriniens etc…
    Je ne dénie en aucun cas les produits naturels, mais je n’adhère pas aux affirmations que ceux-ci sont supérieurs.
    Je fais confiance à la science.

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