En un clin d'œil
Un décryptage de la tendance des cosmétiques “non toxiques”, entre la parano ambiante, le business du green marketing et la réalité de la législation des cosmétiques.
Aujourd’hui, on va parler vocabulaire, marketing et législation cosmétiques. Mais non, restez, je vous jure que ce n’est pas aussi ennuyeux que ça en a l’air!
Si vous me lisez ne serait-ce qu’un peu, vous savez que je suis une passionnée (pour ne pas dire, une hystérique) de cosmétiques. J’en achète beaucoup.
Et vous avez dû remarquer que je n’aime pas trop me limiter géographiquement dans le choix de mes produits. Le shopping en ligne est pour moi une bénédiction car je peux commander presque partout dans le monde!
Découvrir de nouveaux concepts, gestes, ingrédients, qui dépendent souvent de la culture des différents pays… J’adore ça!
Du coup, je m’informe beaucoup et je lis plein d’articles consacrés aux cosmétiques afin d’être au fait des dernières nouveautés. Et ces derniers temps, j’ai pu observer l’émergence d’une tendance forte un peu partout dans le monde: celle des cosmétiques “non toxiques”.
C’est un vaste sujet, sur lequel j’ai envie d’écrire depuis des mois mais je n’osais pas trop me lancer car c’est une question délicate qui génère beaucoup de malentendus, sources de crispations (surtout quand comme moi, on peut être accusée d’avoir un parti pris et d’être vendue à la cause des cosmétiques).
En faisant des recherches sur ce thème, j’ai réalisé que la notion de non toxicité appliquée aux cométiques était un concept à géométrie très variable. D’un pays à l’autre, cette différence n’allait pas de soi. Chez certains, elle semblait même inconcevable, voire absurde (c’est le cas pour bon nombre de compagnies de produits cosmétiques conventionnels français avec qui j’ai pu discuter).
J’ai donc pensé qu’il y avait un article intéressant (et peut-être même utile !) à écrire. J’ai retroussé mes manches et je suis allée regarder ça de plus près!
Avant de rentrer dans le vif du sujet, je tiens à faire un petit “disclaimer”, comme on dit en Anglo-Saxonnie.
Je ne suis ni chimiste, ni médecin, ni toxicologue, ni spécialiste de marketing. Je suis juste une grande amatrice de produits de beauté. Bon, j’ai quand même quelques notions de cosmétologie, de marketing et je connais un peu les bases de la législation liées au domaine en France car c’est là où j’ai effectué mes études en cosmétiques. Donc si mon article présente des incorrections et des approximations, j’espère que vous ne m’en tiendrez pas rigueur!
Et n’hésitez pas à apporter votre éclairage sur le sujet dans les commentaires, c’est toujours très apprécié!
Le contexte: la montée de l’angoisse face aux cosmétiques
L’année 2017 a été marquée en France par une baisse record du volume des ventes de produits d’hygiène-beauté. Une des causes de ce désamour? La méfiance de la part des consommateurs vis-à-vis de certains ingrédients, dits “toxiques” (source: cosmétiquemag).
On ne compte plus les articles dans la presse titrant sur “les ingrédients toxiques à éviter”, “quels cosmétiques peut-on utiliser sans danger?” etc. Le magazine 60 millions de consommateurs sort ce type d’articles très régulièrement et il rencontre à chaque fois un succès énorme auprés du public.
Pour un consommateur souhaitant être averti, il est facile de tomber dans la parano quand on cherche à s’informer…
De cette ambiance assez anxiogène est née une sorte de “courant” avec des marques de cosmétiques communiquant sur le fait qu’elles sont “clean” et certaines depuis peu sont même allées encore plus loin et se qualifient carrément de “non toxiques”. Celles-ci n’hésitent pas à montrer du doigt des ingrédients jugés “toxiques” et qu’elles évitent donc d’utiliser dans leurs formules.
On est donc passé en très peu de temps d’une tendance où il était de bon ton de mettre en avant le côté super naturel de ses formules, à la mise en avant de la « non toxicité » de ces dernières. C’est quand même un choix de vocabulaire particulier, vous ne trouvez pas? Il y a une sacrée différence entre les deux terminologies. Et ce type de communication passe souvent par un shaming (en bon français, le fait de montrer du doigt) de certains ingrédients, qualifiés parfois de “toxiques”, ou en version plus soft “d’indésirables”.
Pour un consommateur souhaitant être averti, il est facile de tomber dans la parano quand on cherche à s’informer là-dessus et ce n’est pas évident de trouver des articles pondérés. Certains font dans l’anxiogène comme 60 millions de consommateurs (il faut dire que ça fait vendre !), d’autres dans le n’importe quoi (comme cet article grotesque du Parisien) et on a aussi la version condescendante, avec des témoignages très utiles d’experts qui vous expliquent que vous n’y connaissez rien et qu’il faut laisser faire les spécialistes (un exemple, cet article de Stylist qui se voulait sans doute humoristique et qui était juste méprisant).
Je prends ici uniquement l’exemple français car c’est celui qui m’est le plus facile d’observer de près mais c’est une tendance de fond mondiale, on aura l’occasion d’en reparler plus bas.
Peut-on dire qu’un cosmétique est toxique?
Soyons clair: tout ingrédient peut avoir des propriétés toxiques, même ceux qui nous semblent les plus inoffensifs. Il est compliqué de qualifier une substance de toxique ou non toxique. Car tout va dépendre de sa concentration dans une formule, de l’endroit où on l’applique, de la façon dont c’est utilisé aussi (une lotion est clairement toxique si vous décidez de l’avaler, par exemple).
La toxicité d’un produit cosmétique est, de toute façon, très régulée. Il est vrai que les fabricants de cosmétiques peuvent être amenés à utiliser des ingrédients décrits comme étant “toxiques” dans l’absolu mais dans des doses très spécifiques, et surtout très contrôlées.
C’est le cas par exemple des ingrédients conservateurs, qui sont toxiques par définition, puisqu’ils tuent/ empêchent la prolifération des microbes, des bactéries et autres moisissures. On ne peut pas s’en passer dans les cosmétiques contenant de l’eau car un produit contaminé pourrait avoir des conséquences sanitaires désastreuses (personne ne veut attraper une infection cutanée en utilisant sa crème de jour).
Un exemple d’ingrédients conservateurs décrié: les parabens, soupçonnés depuis plusieurs années d’être cancérogènes. Selon les experts en formulation cosmétiques, ce sont pourtant des conservateurs très efficaces et parmi les moins irritants. On les trouve même naturellement dans certains aliments comme le miel, ou les fraises, par exemple. On a également beaucoup de recul sur eux car ils ont été utilisés pendant des dizaines d’années.
En 2004, la chercheuse britannique Philippa Darbre met en évidence leur présence dans des biopsies de tumeurs du sein. Son étude sera contestée rapidement après, notamment à cause de sa méthodologie. Elle bénéficiera pourtant d’une diffusion très large auprès du grand public et les consommateurs refusent désormais d’utiliser des produits contenant des parabens. C’est malheureusement l’exemple parfait de la victoire de la parano et de la rumeur sur la réalité des faits.
Le contrôle de la toxicité des cosmétiques:
Je vais parler d’un marché que je connais mieux que les autres pour y avoir longtemps travaillé: la France.
En France, pour mettre un produit cosmétique sur le marché, il y a une procédure très encadrée. Chaque entreprise fabriquant des cosmétiques est déclarée auprès de l’AFSSAPS, l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé, qui gère également les cosmétiques.
Les fabricants de cosmétiques ont dans leurs effectifs un responsable chargé de s’assurer que chaque formule et chaque ingrédient sont bien conformes à la législation en vigueur. Concrètement, ça signifie qu’avant sa mise sur le marché, chaque produit subit toute une batterie de tests.
Quelques exemples:
– vérification de la légalité des ingrédients et de leurs concentrations dans la formule en question,
– études de tolérance sur la peau (tests d’irritation),
– contrôles microbiologiques (pour vérifier si le produit est correctement conservé),
– déclaration des formules aux centres anti-poisons,
– constitution d’un dossier remis ensuite à la commission de cosmétologie de l’AFSSAPS (le CPNP).
(Edit suite à un commentaire de Marie du blog Poupoune in MakeUpLand: Tout passe désormais par le CPNP, qui est un portail européen sur lequel chaque metteur sur le marché donne la formule et les caractéristiques du produit, ainsi que les contacts en cas de contrôle des autorités. L’ AFSSAPS n’existe plus (et la commission de cosmétologie non plus…) c’est l’ANSM maintenant, qui fait des contrôles a posteriori des produits. Globalement il n’y a pas de contrôle des autorités avant mise sur le marché, car l’industrie fonctionne sur le principe de l’auto-régulation. Les autorités de contrôle en France sont l’ANSM (santé du consommateur) et la DGCCRF (qui vérifie que le consommateur n’est pas « trompé par la marchandise »), chacun contrôle donc un aspect spécifique des produits.)
La DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) peut être également amenée à faire des contrôles aléatoires au sein des entreprises pour vérifier que tout est conforme.
Comme vous pouvez le voir, le contrôle des cosmétiques est un sujet pris très au sérieux en France (en Europe également, la procédure est quasiment similaire dans tous les pays européens).
Pour comparer, à Dubaï, où je vis, chaque produit est enregistré de la même façon que si c’était un médicament avant d’être mis sur le marché. Les contrôles sont donc aussi très minutieux (et affreusement longs). Pour s’implanter dans le Golfe, les marques doivent vraiment s’armer de patience!
En Corée du Sud, d’après ce que j’ai pu comprendre quand j’en ai parlé à des professionnels lors du salon Beautyworld de Dubai début Mai, la législation est aussi très stricte et certaines concentrations d’ingrédients sont uniquement réservées au domaine médical. C’est le cas notamment des acides de fruits, très régulés. Cela explique pourquoi les produits aux acides nous venant de Corée du Sud sont toujours très doux (bon à savoir si vous avez une peau sensible et que vous êtes tentés par les acides ! 😉 ).
Mais aux Etats-Unis par contre, l’industrie de la beauté est n’est pas régulée de la même façon qu’en Europe, par exemple.
Une comparaison: en Europe, près de 1500 ingrédients sont bannis des cosmétiques. Aux Etats-Unis, on compte seulement 30 ingrédients interdits. La loi qui gère les cosmétiques outre-Atlantique, la FFDCA (Federal Food, Drug and Cosmetics Act) n’a pas été mise à jour depuis 1938 (!).
Pas étonnant que la tendance des “non-toxic skincare” soit un vrai phénomène là-bas. Car aux Etats-Unis, il s’agit d’un réel problème de santé et même, un véritable enjeu politique. Il y a quelques semaines, Kourtney Kardashian s’est même rendue au Sénat Américain pour discuter du sujet répondant ainsi à une campagne de communication lancée par deux sénatrices en faveur d’une meilleure régulation des cosmétiques (bien entendu, le fait qu’elle ait lancé une ligne de maquillage avec sa sœur Kylie le même jour n’est que pure coïncidence, vous voyez le mal partout!) (il n’y pas à dire, les Kardashian sont ce qu’elles sont, mais ce sont les reines de la com’).
Et comme souvent aux US, cette situation est aussi une opportunité de faire du business en prenant le contre-pied de cette régulation plus permissive et en communiquant sur le fait de proposer des produits “non-toxiques”.
Sephora US vient par exemple d’annoncer le lancement d’une section “Clean at Sephora” avec des produits se voulant exempts d’ingrédients décriés. Une façon pour eux de rassurer leur clientèle tout en profitant de la tendance.
De “naturel” à “non-toxique” : quand le vocabulaire devient un enjeu marketing:
Avec le mouvement de retour au naturel, les produits bio ont littéralement explosé. Ils inspirent plus de confiance aux consommateurs dans le doute, qui se sentent rassurés par la présence de nombreux labels sur les étiquettes.
“Non toxique” est très problématique car il sous-entend […] que les autres cosmétiques sur le marché sont toxiques…
Mais le terme “bio”, plutôt pensé à la base pour l’alimentation, est vite devenu problématique pour beaucoup de produits, car il exclut de fait une énorme partie des cosmétiques.
En effet, pour être considéré comme 100% bio, un produit doit répondre aux certifications de labels biologiques (en France, les plus connus sont Ecocert, Cosmebio ou encore Cosmos) et par exemple, la plupart des produits cosmétiques qui contiennent de l’eau ne répondent pas aux exigences de ces labels (l’eau ne peut pas être certifiée bio)
(Edit suite à un commentaire d’Alina, une précision: apparemment, un produit contenant de l’eau peut être certifié bio, mais l’eau contenue doit respecter un certain pourcentage ou être de l’eau extraite de la plante, comme les hydrolats bio, par exemple) (à vérifier, si un laboratoire de produits bio passe par ici… ).
On emploie aussi beaucoup le terme de produit “naturel”, un mot assez vague et qui a vite montré ses limites: un produit peut se revendiquer naturel même s’il ne contient qu’un seul extrait de plantes concentré à 0.00000001% (je n’ai d’ailleurs pas trouvé de définition légale sur les produits dits “naturels”).
(Edit suite à un commentaire de Marie du blog Poupoune in MakeUpLand: en France, les marques peuvent revendiquer un produit naturel si sa formule est d’origine naturelle à plus de 95%, par contre, aux États-Unis, c’est bien la définition que j’ai donné au dessus. )
Et puis, ça a été ensuite l’avènement des produits “propres” ou plutôt “clean” (car c’est bien connu, tout paraît mieux quand on le dit en anglais).
Un produit “propre” ou “clean” indique par cette dénomination qu’il est un produit “sans”, donc qui exclut l’utilisation de certains ingrédients. Principalement des ingrédients sur lesquels les consommateurs ont des interrogations (à tort ou à raison d’ailleurs).
La dénomination “sans” a aussi eu son heure de gloire. Bon nombre de marques cosmétiques en ont usé et abusé sur leurs étiquettes avec parfois des exemples assez absurdes comme des huiles “sans parabens” (sachant que ce type de produits n’en a généralement pas besoin car une huile ne contient pas d’eau) ou des après-shampoings “sans sulfates” et des shampoings “sans silicones” (généralement, les silicones sont plutôt utilisées dans les après-shampoings pour aider à démêler les cheveux et les sulfates sont des ingrédients nettoyants, donc plus adaptés aux shampoings). Où cesse l’information, quand commence le marketing dans ce cas-là?
A noter: en France, la dénomination “sans” est désormais déconseillée sur un produit cosmétique comme revendication principale de celui-ci. Elle ne doit être utilisée que comme information complémentaire. Voici le discours officiel de l’ARPP (Autorité de la Régulation Professionnelle de la Publicité):
“a/ Afin de contribuer à une image valorisante des produits cosmétiques, la publicité doit être essentiellement consacrée aux arguments positifs.
b/ A ce titre, l’utilisation d’une allégation indiquant l’absence d’un ou de plusieurs ingrédients ou d’une catégorie d’ingrédients n’est possible que si cette allégation respecte les conditions spécifiques suivantes:
b/1 Elle ne constitue pas l’argument principal du produit mais apporte au consommateur une information complémentaire;
b/2 Elle n’est pas dénigrante, notamment elle ne met pas en avant un risque ou un danger pour la santé ou l’environnement;
b/3 Elle est loyale et non mensongère, en particulier lorsque l’ingrédient ou la combinaison d’ingrédients peuvent être apportés de manière indirecte, notamment par l’intermédiaire d’une autre matière première.”
Et donc, tout naturellement, on a commencé à entendre de plus en plus parler de produits “non toxiques” ou “safe” (encore l’anglais), pour appuyer le fait qu’ils n’utilisent pas ces fameux ingrédients.
“Non toxique” est très problématique car il sous-entend de fait que les autres cosmétiques sur le marché sont toxiques, ce qui est faux et dénigrant. Et c’est surtout un terme qui est, en France en tout cas, interdit. Justement à cause du sous-entendu que cela implique. J’ai pu le vérifier avec tous les professionnels français avec qui j’ai eu l’occasion d’en discuter lors du salon Beautyworld (So du blog (dé)maquillages qui est cosmétologue de métier et qui a beaucoup écrit sur ce sujet me l’a confirmé également).
Mais aux Etats-Unis (toujours eux), le terme “non toxique” n’est pas interdit et il est même très utilisé! Il suffit de jeter un œil à la description de certaines marques de soin américaines “naturelles” pour retrouver la mention “non-toxic skincare”, parfois même dès la description de la marque sur Google (Herbivore, Tata Harper, Goop et des tas d’autres le font sans scrupules!).
Ce type de dénomination est clairement utilisée ici comme un argument marketing mais ce faisant, elle augmente surtout l’angoisse et la confusion des consommateurs en jouant sur leurs peurs.
S’informer sans paniquer: plus facile à dire qu’à faire!
Il est facile de paniquer quand on lit les gros titres de la presse (il suffit juste de taper dans Google France “soin non toxiques” comme je l’ai fait en préparant cet article et vous verrez tout de suite de quoi je parle).
Même si la prudence est de mise, c’est important de se rendre compte que l’industrie cosmétique est quand même très bien réglementée, surtout si vous vivez en France. Aux US, c’est plus compliqué malheureusement et il vaut mieux savoir décrypter un minimum les étiquettes.
…une formule de produit cosmétique ne se résume pas à la liste de ses ingrédients.
Précisément, à ce propos, j’ai noté que la tendance était aux applications sur téléphone vous permettant de scanner les listes d’ingrédients. Il y a pas mal d’apps de ce type en France (Clean Beauty, Quelcosmetic, celle du magazine Que Choisir qui a senti le bon filon). Je vous laisse aller lire les excellents articles d’Alina à leurs sujets sur son blog kleo beauté, je partage complètement son opinion.
Elles sont aussi très populaires en Corée du Sud. C’est même devenu un vrai phénomène là-bas avec l’application très populaire Hwahae. Là bas, beaucoup refusent d’acheter un produit s’ils ne l’ont pas fait passer au crible de Hwahae d’abord.
Cette tendance peut être bénéfique en un sens car sa popularité fait que les industriels des cosmétiques sont souvent forcés de revoir leur copie afin de proposer des produits plus en adéquations avec le désir “clean” de leurs clients.
Mais là où c’est plus embêtant, c’est quand ce type d’outils montrent du doigt certains ingrédients sans donner plus d’explications que ça. Les raisons pour lesquelles il faudrait éviter tel ou tel ingrédient sont rarement citées. Résultat, beaucoup de consommateurs décident d’éviter certains ingrédients sans vraiment savoir pourquoi. Les formulateurs sont donc obligés d’adapter leurs formules s’ils veulent continuer à vendre leurs produits.
Or, dans certains cas, on remplace des ingrédients décriés par des options qui ne sont pas mieux et qui peuvent même être pires. Pour reprendre l’exemple des parabens cités plus haut, dans ce cas précis, les parabens ont été remplacés par d’autres conservateurs, souvent plus allergisants, comme le phenoxyethanol, par exemple (les formulateurs savaient très bien que celui-ci n’était pas un choix idéal comparé aux parabens, mais vu la pression populaire, il a bien fallu proposer quelque chose pour les remplacer).
Pour revenir au sujet des apps, il y a aussi un aspect qu’elles laissent complètement de côté: une formule de produit cosmétique ne se résume pas à la liste de ses ingrédients! La concentration de chacun rentre en ligne de compte, les associations entre certains des ingrédients aussi. Bref, on ne peut pas décréter qu’un produit est “toxique” juste à cause d’un ingrédient trouvé dans sa liste.
Personnellement, je regarde de près les formules de mes cosmétiques, non pas parce que je pense qu’ils sont toxiques, mais plus car j’essaie de privilégier des formules bien équilibrées, mettant en avant des ingrédients utiles à ma peau plutôt que ceux qui sont surtout là pour donner une jolie texture et un parfum agréable.
J’évite une formule remplie de silicones pour cette raison notamment, car celles-ci sont des ingrédients texturisants sans grand intérêt pour la peau et de fait, elles ne m’intéressent pas vraiment en grande quantité dans mes soins. En plus, ma peau à tendance acnéique ne les adore pas quand elles sont trop présentes dans une formule. Même chose pour l’huile minérale, qui n’est certainement pas cancérigène comme j’ai pu le lire parfois (la version utilisée en cosmétique est raffinée et hautement purifiée, elle est totalement safe), mais qui est un peu trop occlusive pour ma peau à tendance acnéique. S’il y en a en petite quantité dans une formule, ça ne m’empêchera pas d’utiliser un produit, par contre. Tout est une question de bon équilibre dans une formule!
En conclusion:
Ce n’est pas évident pour moi de rester complètement neutre sur ce sujet, de ne pas prendre parti. Ce que je peux simplement vous dire, c’est que, surtout si vous êtes en Europe, la législation est tout de même très stricte et les industriels sont vraiment attentifs aux changements de la réglementation concernant certains ingrédients décriés.
Les professionnels le disent eux-mêmes: les formulations des produits d’hygiène et de beauté évoluent en permanence en fonction des avancées scientifiques et de la législation. Les compagnies essaient d’anticiper la règlementation du mieux qu’elles le peuvent, surtout les marques bien établies et appréciées des consommateurs. Celles-ci n’ont en effet aucun intérêt à perdre la confiance de leurs clients.
Pour le mot de la fin, je dirai que même si la vigilance prévaut toujours, il faut aussi faire attention au greenwashing allégrement pratiqué par certaines marques et stopper également l’ingrédient bashing qui dans certains cas, peut reposer sur des idées fausses et n’aide pas vraiment le consommateur à comprendre comment mieux choisir ses produits cosmétiques. Bien se renseigner, c’est bien, mais sans être guidé par l’angoisse, c’est mieux!
Pour poursuivre la réflexion sur ce sujet, un excellent article paru sur le magazine américain en ligne Vox:
“The “natural” beauty industry is on the rise because we’re scared of chemicals”
article très intéressant et très modéré en effet, loin du sensationnalisme actuel. Une remarque pour amener de l’eau à ton moulin : beaucoup de monde se tourne vers le DIY et les huiles essentielles en pensant que, au moins, ils savent se qu’ils mettent dans leurs cosmétiques. Le problème, c’est que les tambouilles maison peuvent se révéler désastreuses parce que les gens ne connaissent pas les ingrédients et que les huiles essentielles peuvent être aussi allergisantes, voire plus, que les produits dits “chimiques”. Ce qui est naturel n’est pas non plus sans danger, loin de là (ex : ciguë, digitale …)
On est bien d’accord! Je n’ai même pas voulu rentrer dans le début du “naturel” contre “chimique” tellement je le trouve stérile. Tout est un produit chimique, même de l’eau! Et tu as raison pour les “tambouilles maison”. En plus, ça peut être des nids à bactéries! Je lisais la story d’une blogueuse australienne que j’aime beaucoup hier sur Instagram et elle disait un truc qui m’a fait rire en anglais à ce propos: “Enjoy your skin infection!”
Bonjour, article encore une fois très instructif et si on s’interesse un peu au skincare qu’il est important de lire. Je suis assez d’accord avec toi, je crois qu’il faut de raisonner et ne pas tomber dans le piège du toxique vs non toxique qui je trouve ne veut pas dire grand chose au final,à ce moment là j’arrête de respirer vu la pollution ambiante?, à contrario une huile essentielle bien que naturelle peut avoir un réel potentiel toxique (pour le coup dans le sens mortel de la chose), je crois que comme dans tout il est question de dosage. Je préfère une union du meilleur de la science et du meilleur de la nature (sans forcément opposer les deux à chaque fois). Après je peux comprendre que l’argument “naturel” ou “non toxique” rassurre vu tout les scandales auquels on est confronté aujourd’hui. Du coup c est embêtant et on arrive à de sacrées psychoses qui finalement font pire que bien (remplacer les parabènes par le phenoxyethanol par exemple me dérange j’avoue, surtout si c est pire je ne vois pas l’intérêt si c est un ingrédient encore plus mauvais?). Après si on peut se passer de ces ingrédients controversés je ne suis pas contre, tant qu’on évolue vers le meilleur pour l’homme et la nature (parce que il y a l’impact écologique de certains ingrédients aussi) je suis tout à fait pour !
La où je te rejoins aussi (et je crois que c est ça qui m’enerve le plus) c est nous prendre pour des pigeons à nous vendre des produits parfois hyper cher composé le plus souvent d’eau et de silicone? je paye pour des produits actifs, je paye pour des formules efficaces pas pour des produits simplement agréables à utiliser (le silicone par exemple ne me fait pas peur, mais non seulement c est polluant mais en plus il n y a aucun interêt pour la peau). Par rapport au label bio, en fait je n’y fait pas vraiment attention en cosmétique, il y a des marques qui sont hyper qualitatives (notamment pour les huiles végétales où la je fais vraiment attention pour le coup) et qui n’ont pas le label bio (je crois que ça coûte assez cher en plus ?). Je crois que le plus important c est d’apprendre à dépasser le marketing et de se pencher sur la liste INCI, et c’est pour ça que ce genre d’article que tu fais (ou ceux de kleo-beauté, le seul autre blog que je suis avec le tien) est hyper important car ça permet de remettre les choses à plat sans tomber dans le drama du marketing?. Merci pour ça ! Bonne journée à toi
Merci beaucoup Sabrina, et on est d’accord sur toute la ligne! 🙂
PS: pour le prix des labels bio, apparemment ça dépend des labels, mais oui, c’est effectivement payant (cher, je ne sais pas trop, mais après, j’imagine que les marques s’y retrouvent vu que ça rassure leurs clients et que ça les incite davantage à acheter).
Coucou, il est très très bien ton article ! Vraiment clair, accessible et synthétique, bravo !!
Une toute petite précision, Cosmos est un label européen très récemment créé par BDIH afin d’harmoniser les 5 labels les plus connus de différents pays d’Europe (il englobe désormais Ecocert, Cosmebio pour la France, BDIH Allemand, ICEA pour l’Italie et Soil Association pour UK) A partir de 1 er janvier 2017 ce label remplace les labels Nationaux (tu dois maintenant mettre COSMOS et ensuite préciser le label du pays (Ecocert, pour la France, par exemple). À mon avis, c’est transitoire, dans quelques années il n’y aura que COSMOS, pour le moment ils précisent le label national pour ne pas perturber le conso qui n’est pas encore à 100% averti de ces changements.
Également, pour l’eau : tu peux certifier l’eau comme bio quand elle est extraite de la plante (exemple, les hydrolats bio). Tu peux aussi certifier un produit bio quand il contient de l’eau, mais cela doit respecter un certain pourcentage ?
Merci beaucoup pour toutes ces précisions!!! Elles sont vraiment éclairantes et précieuses!
Très bonne nouvelle pour l’harmonisation des labels, c’est en effet assez complexe de s’y retrouver entre tous ceux qui existent actuellement pour le consommateur, moi la première! 😉
Et merci pour la précision sur l’eau, je vais rectifier ça dans l’article 🙂
PS: et j’adore le fait que tu trouves mon article si long “synthétique”, ça me déculpabilise bien de ne pas savoir écrire des posts courts ah ah ah
Bonjour, moi qui en suis toujours à regretter les parabènes (parce que je faisais moins de réactions à l’époque) j’aime bien l’application Clean parce qu’elle détecte ce qui pourrait poser problème (et m’évite de m’user les yeux) et qu’ensuite c’est moi qui choisis. elle repère les silicones qui ne me dérangent pas forcément et que j’achète par exemple, mais aussi le phénoxyéthanol qui m’embête plus et que je laissent en rayon. Maintenant, je dois dire que j’achète beaucoup plus sur internet parce que les listes d’ingrédients en lignes sont plus lisibles et que j’ai plus le temps de réfléchir qu’en magasin sans qu’une vendeuse ne viennent me déranger. Ce que je ne comprends toujours pas: les marques et les sites marchands qui ne mettent pas en ligne les listes INCI. Mais comment c’est possible en 2018?
Le bio? Pour moi, c’est un label qui est utile pour préserver l’environnement, mais “qui ne sert à rien en beauté” parce que ce n’est pas une garantie que ça fera du bien à notre peau. Ni même que ça ne lui fera pas de mal d’ailleurs. Et même ça, c’est un peu une excuse pour déculpabiliser sans pour autant consommer et gaspiller moins.Ai-je vraiment, après tout, besoin d’un tonique après mon tonique? (Je sais que tu vas me répondre oui, c’est pour ça que je le dis ici!)
à bientôt pour de nouveaux bons (et longs) articles!
On est d’accord, c’est vrai que si on se sert de l’application uniquement pour la liste d’ingrédient, il y a une utilité, c’est sûr. Moi, c’est plus le système de notation qui vient avec qui me pose problème!
Tu as bien raison, je ne comprends pas non plus les marques qui ne mettent pas les listes INCI à disposition pour leurs clients (en plus, je crois bien que c’est illégal maintenant).
Oui, voilà, j’ai la même vision des choses concernant le bio, pour la peau, pas sûre que ça fasse une grosse différence mais pour la planète, effectivement, c’est une autre histoire!
Et évidemment que tu as besoin des plusieurs toniques, enfin, comment peux-tu te poser la question? ah ah ah ah 😉
Ravie que l’article t’ai plu en tout cas! 🙂 (et Alina m’a dit en commentaire qu’il était “synthétique” donc il n’est pas si long que ça en vrai, ce n’est qu’une impression)(ah ah ah 😛 )
J’ai lu quelque part que la DGCCRF allait partir en “chasse” sur les sites en lignes de produits de beauté qui ne mettent pas la liste des ingrédients car c’est obligatoire!
Moi, j’envoie un mail et je leur demande pourquoi elles ne figurent pas. Seul Yves Rocher m’a répondu que cela allait être fait et c’est exact ! Silence sur beaucoup de grands noms de la cosmétiques ….
Oui, j’ai lu ça aussi! Il serait temps quand même, je ne comprends même pas les marques qui ne le font pas!
Bonne idée pour le mail, mais c’est choquant que presque personne ne t’ai répondu! J’imagine que ça veut dire qu’ils se savent dans leur tort, et qu’ils n’en sont pas très fiers… :/
Je confirme que cette année la DGCCRF va sanctionner les marques dont les sites web n’affichent pas la liste INCI 😉
Ah ben voilà, merci pour la confirmation! 🙂
Hello,
J’ai découvert ton blog récemment ( j’en ai profité pour lire beaucoup d’articles de l’ancien (super). Je lis aussi Alina, toujours très instructif.
Ton article est passionnant, la compo des produits me passionne depuis très très longtemps….
Je suis plus d’addict “Skin Care”” çà fait chic :))))!
J’utilise plutôt des produits bio français sans être non plus bornées. J’examine les compo de près et je fuis certains ingrédients, les silicones les huiles minérales si ils sont trop présents. Je me fixe sur les 5 ou6 premiers.
Pour les appli, c’est pas mal cela peut aider mais à ne pas suivre au pied de la lettre !!!
A bientôt .
Bienvenue Laurence! 🙂
Ça me fait super plaisir, merci beaucoup! On est d’accord sur beaucoup de points! Je crois effectivement que les applis peuvent aider à débroussailler les compos mais leur système de notation qui a un peu trop tendance à diaboliser certains ingrédients est pour moi assez dérangeant. Maintenant, comme tu le dis, on peut tout à fait s’en servir selon son besoin et ne pas suivre leurs recommandations aveuglément! 🙂
Je n’utilise pas d’application pour savoir si tel produit est safe, d’abord je n’y connais rien et comme tu le précises ce n’est pas parce qu’1 ou 2 ingrédients seront mauvais qu’il faut tout de suite rejeter le produit ! Certains labels sont assez connus maintenant et on peut faire confiance et acheter des soins en toute confiance. Après c’est une question de budget, le mien est très petit d’où mon intérêt à cibler des produits vendus en grandes surfaces, et j’aime aussi les magasins biocoop où l’on trouve pas mal de marque bio et naturelle à des prix abordables !
C’est vrai qu’on trouve des merveilles à Biocoop! ? Et tu as raison, un produit cosmétique ne se résume pas à 1 ou 2 ingrédients ?
Hello Bonnie,
Félicitations c’est un beau billet 😉
Je me permets juste quelques corrections vu que la réglementation cosmétique c’est mon boulot (enfin en ce moment ^^).
Il n’y a plus de déclaration des produits aux centres anti-poisons, tout passe par le CPNP, qui est un portail européen sur lequel chaque metteur sur le marché donne la formule et les caractéristiques du produit, ainsi que les contacts en cas de contrôle des autorités.
L’ AFSSAPS n’existe plus (et la commission de cosmétologie non plus…) c’est l’ANSM maintenant, qui fait des contrôles a postériori des produits. Globalement il n’y a pas de contrôle des autorités avant mise sur le marché, car l’industrie fonctionne sur le principe de l’auto-régulation. A posteriori les autorités de contrôle en France sont l’ANSM (santé du consommateur) et la DGCCRF (vérifie que le consommateur n’est pas « trompé par la marchandise »), chacun contrôle donc un aspect spécifique.
Pour les produits naturels, les marques peuvent claimer un produit naturel si sa formule est d’origine naturelle à plus de 95%.
Je te remercie en tout cas de rappeler qu’un cosmétique est plus que la liste de ses ingrédients, je m’échine à le dire !!
Merci beaucoup pour toutes ces précisions, c’est super et très complet!!! Je vais les rajouter dans l’article! 😀
Et oui, on est bien d’accord, un produit est bien plus que la liste de ses ingrédients, mais j’ai bien peur qu’on n’ai pas fini de le répéter vu l’ambiance actuelle! ?
Hello there !
Je te remercie pour cet article très intéressant, et qui arrive à point nommé. Déjà car, personnellement, je m’intéresse de plus en plus aux compos des produits que j’applique sur mon visage/ mon corps, etc… J’ai tout de même une routine layering assez importante ! Et en prenant conscience de la “toxicité” de certains ingrédients, je n’avais qu’une envie : mettre à la poubelle la moitié de mon stock…. Je voulais passer à une routine 100% bio et naturelle, afin de n’appliquer que des produits “sains” pour ma peau. Quelle erreur ! ^^
Heureusement pour moi, je suis très bien entourée. J’ai parmi mes amis une toxicologue et un chimiste qui travaillent depuis des années pour des labos cosmétiques et ces personnes m’ont beaucoup fait réfléchir quand j’ai abordé le sujet des compositions avec eux. Le point auquel ils s’accordent tous les deux : la toxicité d’un ingrédient augmente avec la fréquence à laquelle on l’utilise sur la peau… Il paraît d’ailleurs que les huiles essentielles seront, dans quelques années, les ingrédients à éviter dans les produits cosmétiques ! Une autre chose sur laquelle ils m’ont fait réfléchir : les marques “bios et naturelles” ne sont pas forcément parfaites. Elles peuvent en effet proposer à la vente des produits dont les ingrédients sont 100% d’origine naturelle mais à quoi bon si la méthode d’extraction de ces produits se fait aux détriments des travailleurs locaux ? L’esclavagisme moderne est malheureusement une donnée à prendre en compte.
Enfin voilà, navrée pour ce pavé très auto-centré et peut-être un peu indigeste ^^ Mais pour résumer, j’ai comme toi l’impression qu’il y a une véritable obsession ces dernières des compos “clean” mais qu’on ne cherche pas vraiment à décrypter le pourquoi du comment telle marque utilise cette molécule chimique en telle place dans sa compo. Avoir une routine 100% naturelle ne me paraît pas être la meilleure solution, je pense que le tout est de savoir jongler entre le conventionnel et le naturel…
Mais non, au contraire, ton commentaire est super intéressant!
Tu as tout à fait raison, le côté éthique d’une produit est aussi très important ou en tout cas, il devrait l’être, au même titre que le reste.
Je lisais justement un article super intéressant sur le sujet justement ce matin, je te donne le lien, ça t’intéressera sûrement: https://www.racked.com/2018/6/22/17492838/human-rights-sustainability-cosmetics-supply-chain
Pour les huiles essentielles, je sais qu’aux États-Unis, elles sont très décriées en ce moment. Pour ma part, je suis plus mesurée par rapport à leur “dangerosité” (je grossis volontairement le trait). J’ai travaillé pendant des années pour une marque de cosmétiques qui les utilisait et j’ai vraiment vu leurs bienfaits sur la peau. Je pense que c’est comme tout, c’est une question de dosage! Et il faut aussi savoir bien les choisir, en fonction de ses besoins.
Mais je sais qu’elles ont leurs détracteurs, et j’entends leurs arguments.
Et je suis bien d’accord avec toi, lire une liste d’ingrédients n’aide pas vraiment à comprendre comment est construite une formule. Malheureusement, il y a tellement de paramètres à considérer que ce n’est pas super évident pour les marques (ou même pour moi ?) à expliquer!
En tout cas, un seul article n’y suffira pas, il m’en faudra sans doute plusieurs ?