Fin Janvier 2018, un article a fait grand bruit dans la petite communauté des skincare addicts. Il s’agit d’un article du site theoutline.com, intitulé The skincare con (on pourrait le traduire par « le soin de la peau, cette arnaque ») et mettant notamment en cause le succès actuel des nouvelles marques de soin et en dénonçant ce que l’auteur a appelé la « violence chimique » des acides sur la peau.
Prendre soin de sa peau n’est certainement pas nouveau (demandez-donc à Cléopâtre!) mais il est vrai qu’en ce moment, beaucoup de nouvelles marques des soins indépendantes émergent et on voit aussi de plus en plus de « tendances soin» dans le marché de la beauté. La Green Beauty se porte très bien. La K-Beauty est en train d’exploser. Des compagnies comme Deciem cartonnent avec leur marque comme The Ordinary qui fait la part belle à des ingrédients cosmétiques très pointus. Bref, comme le dit la journaliste Cheryl Wischhover de Racked dans un article écrit en réaction de celui de theoutline.com, “We are in a golden age of skincare” (= nous sommes à l’âge d’or du soin).
L’article de theoutline.com est assez provocateur et met en cause la légitimité même du soin ainsi que sa popularité. Faisant moi-même partie du milieu de la beauté, il m’est certes difficile d’être objective mais je dois quand même dire que j’ai trouvé cet article très exagéré et d’assez mauvaise foi sur beaucoup d’aspects.
Je suis d’ailleurs tout à fait d’accord avec les contres-arguments que j’ai lu dans l’article de Racked écrit en réaction à cet article de theoutline.com.
Aujourd’hui, je voudrais surtout revenir sur un passage où l’auteur compare l’utilisation des acides exfoliants sur la peau à de la « violence chimique » (en anglais, chemical violence).
Les acides exfoliants ont toujours suscité beaucoup de réactions de crainte. Il est vrai que leur utilisation n’est pas anodine mais choisir de la dramatiser à outrance comme l’auteur de l’article de theoutline.com le fait ne rend service à personne, et surtout pas aux consommateurs que l’auteur prétend vouloir libérer de cette “arnaque” qu’elle considère être le soin de la peau (facile à dire quand on a 25 ans et de bons gênes, mais ce n’est pas le cas de tout le monde, moi la première).
Elle donne notamment l’exemple de la marque Glossier qui vient de lancer une lotion aux acides, Solution. Ce produit est « marqueté » par la marque comme une lotion « perfectrice de peau » et dans leur énorme campagne de pub, on voit notamment des très jeunes gens parler des résultats obtenus avec ce produit sur leur acné en seulement quatre semaines.
L’auteur parle aussi des méthodes de marketing typiques de Glossier, destinées en priorité aux millenials et prenant la forme du « bon conseil de copine ». La marque a en effet fait des articles consacré à Solution sur le blog Into The Gloss qui appartient à la même personne qui est derrière Glossier, Emily Weiss. Ces articles sont des « témoignages » de personnes ayant utilisé Solution (je vous avoue que ça me fait plus penser à du contenu publi-rédactionnel, comme beaucoup du contenu de ce « blog » quand il s’agit des produits Glossier). Bien entendu, elles racontent comment leur peau a été transformée en quelques semaines grâce à Solution. Glossier a aussi fait toute une campagne sur leurs réseaux sociaux, notamment leur compte Instagram.
Dans l’article de theoutline.com, l’auteur évoque la position de Glossier par rapport aux acides de son produit Solution, considérés par la marque comme « super safe » et « les meilleurs amis de votre peau ». L’auteur critique notamment le fait que Glossier refuse « d’admettre les risques d’une utilisation prolongée ou inadéquate des acides » en citant moult exemples horribles où des personnes se retrouvent avec leur peau à vif car elles ont utilisés une combinaison détonante d’acides, de rétinol et de gommage à grains. Evidemment, ces exemples sont, je trouve, très excessifs. Les personnes qui s’intéressent un minimum au soin de la peau le savent bien, on évite d’utiliser des gommages à grains en même temps que des acides, c’est une règle bien connue.
Mais je vous avoue que même si j’ai trouvé ces exemples inappropriés et exagérés, je suis moi-même un peu gênée par la communication faite autour du produit Solution par Glossier.
D’une part, si on va sur la fiche produit de Solution sur le site de Glossier, il n’y a aucune précaution d’usage mentionnée. Il n’est pas clairement indiqué par exemple que le rétinol et les gommages physiques sont à éviter pendant la durée d’utilisation du traitement.
D’autre part, le jour du lancement de Solution, j’ai notamment été assez surprise de lire dans les stories Instagram de la marque que l’utilisation d’un écran solaire avec Solution n’était nécessaire que dans le cas où l’on utilisait le produit le matin (j’en ai parlé dans mon focus sur les acides exfoliants, à partir du moment où on utilise ce type de produit, que ce soit le matin ou le soir, l’utilisation d’un écran solaire est obligatoire tous les jours!).
Les acides exfoliants sont des ingrédients extrêmement efficaces, j’en suis convaincue, mais il faut aussi savoir les utiliser correctement. Et c’est de la responsabilité des marques d’informer leurs consommateurs un minimum de la bonne marche à suivre pour utiliser au mieux leurs produits.
Beaucoup de consommateurs, en tout cas en France, c’est certain, ont peur d’utiliser des acides. Cette peur est un peu exagérée selon moi et est très certainement liée au nom même de ces ingrédients, les acides (toutes ces scènes de films où un personnage se fait dissoudre dans un bain d’acide, ça vous traumatiserait n’importe qui!). Je peux donc éventuellement comprendre la volonté d’une marque comme Glossier qui veut dédramatiser leur utilisation grâce à une communication très positive (afin de surfer sur la tendance et d’en profiter financièrement, entendons-nous bien)(une amie m’a dit l’autre jour sur Instagram que Glossier était « 90% de hype pour 10% de réel intérêt », j’ai trouvé ça très drôle et assez juste)
Mais il y a certainement un juste milieu entre « les acides sont les meilleurs amis de votre peau et ils sont super safes » et « les acides sont de la violence chimique pour votre peau ».
La plupart des marques qui vendent des produits aux acides exfoliants sont d’ailleurs dans une démarche positive rassurante mais aussi très informative. Dédramatiser leur utilisation, certes mais en rappelant les précautions d’usage, c’est tout de même mieux.
Donc quand l’article de theoutline.com met toutes les marques qui vendent des produits aux acides dans le même panier, je trouve ça d’autant plus injuste.
Une marque comme Biologique Recherche par exemple, créateur de la célèbre dont j’ai fait la revue et qui est assez violemment moquée à cause de son odeur dans l’article de theoutline.com, insiste sur le fait qu’il est nécessaire de se rendre sur le point de vente physique afin de bénéficier d’un conseil éclairé de la part de leurs conseillers.
Cela permet à la marque, en effet, d’être certain que le client aura tous les éléments en mains avant d’utiliser ses produits. Bien entendu, à l’heure de l’achat en ligne en quelques clics, c’est une démarche pour le moins ambitieuse mais Biologique Recherche a le mérite, ce faisant, d’être intransigeant et très professionnel.
La marque Drunk Elephant, citée aussi dans l’article de theoutline.com et dont j’ai également beaucoup parlé ici, est toujours dans une communication très informative, sur son site tout d’abord mais aussi sur ses réseaux sociaux, où les commentaires de ses clients trouvent toujours réponse.
Considérer que toutes les marques qui vendent des produits aux acides sont irresponsables est donc, selon moi, très caricatural et réducteur et je ne pense pas que les acides exfoliants soient de la “violence chimique” pour la peau, loin de là, quand on les utilise correctement!
Je suis très curieuse de savoir ce que vous en pensez.
Avez-vous lu l’article de theoutline.com? Pensez-vous aussi que les acides sont une “violence chimique” pour la peau? Dîtes moi tout en commentaire!
Les deux articles sont en anglais.
L’article de theoutline.com: The skincare con (vous remarquerez le choix des mots clés dans l’url, le soin est une arnaque mais je prendrais quand même un peu de son SEO, merci bien 😉 )
L’article de Racked écrit en réaction: Skincare is good and also works (le choix des mots clés de l’url est aussi une réponse à l’article précédent et ça m’a bien fait rire ^^)
Bonsoir,
Je dois avouer que ne comprenant pas bien l’anglais? c est interessant de pouvoir lire ton compte rendu. C est marrant cette façon de totalement dramatiser les soins (et en l’occurence les acides), je ne sais pas si c est pour faire le buzz ou autre, mais diffuser des propos érronés comme ça me semble tellement dingue (et puis mince si on aime le soin et faire des routines longues comme le bras c est notre plaisir et notre choix… franchement ?). En ce qui concerne les acides à proprement parlé, il y a je trouve assez d’informations à ce sujet pour ne plus en avoir peur, et comme tu le soulignes si on s’interresse un minimum au sujet, on sait ce qu on doit faire ou pas. Personnellement je n ai pas encore incorporé cette étape dans ma routine de soin, pas par peur, mais je dois avouer ne pas en avoir (encore) ressentis le besoin. Merci encore d’apporter une vraie information dans ce meli melo.
Oui, clairement, je crois bien que l’auteur avait écrit cet article outrancier pour faire le buzz. Pas de bol pour elle, ça c’est plutôt transformé en bad buzz ? On est bien d’accord, maintenant avec toutes les infos que l’on veut à portée de main, il faut vraiment le vouloir pour faire les associations hasardeuses d’ingrédients actifs dont l’auteur de l’article parle!
J’ai commencé à utiliser des acides il y des années, mais seulement en cure 2 fois par an pendant longtemps. Ce n’est que récemment que je les ai rajouté à ma routine de façon plus régulière. Et clairement, leur utilisation n’est pas une obligation, c’est vraiment comme on le sent. Il y a beaucoup d’autres ingrédients cosmétiques très efficaces sur le marché ?
Salut Bonnie 😉
J’ai essayé les acides de fruits et autres de type acide glycolique il y a 20 ou 25 ans (Mene & Moy, Neostrata) et cela a toujours été une catastrophe. Comme ma peau ne supporte pas la vitamine A (rétinol et tous ses dérivés) j’ai quand même essayé d’autres produits (récemment encore le Retexturing Activator) mais immanquablement et malgré moults précautions (1 soir sur 3, 1 soir sur 5) je finissais la peau en parchemin (super quand tu le testes pour l’effet anti-vieillissement !) ou dans un état dégueulasse et tout granuleux (super quand tu le testes pour l’effet belle peau saine et éclatante) 😀
Bref, tout ça pour dire, que je comprends aisément les personnes qui, comme moi, en sont revenues.
Maintenant, si je partage le terme “violence chimique pour la peau” (vu les résultats sur la mienne) je reconnais volontiers que ce type de molécules fonctionnent pour certaines alors je n’aurais peut-être pas écrit un article aussi virulent que la personne dont tu parles. Toutefois, excuse-moi, mais quand ceux qui auront utilisé ces ingrédients pendant de longues années et arriveront vers leurs 60 ans, avec peut-être en plus un abus de soleil quand ils étaient enfants ou ado, quel sera l’état de leur peau à ce moment là ? C’est surtout ce futur qui m’inquiète.
Toutefois, je me dis que la science, la médecine médicale et la cosméto, auront trouvé d’ici là un nouvel ingrédient pour remettre tout ça d’aplomb 😉 Je le souhaite en tout cas 🙂
Coucou ?
Oui, je comprends bien ta réserve vue ton expérience avec ces molécules.
Dans le cas de cet article, la personne qui l’a écrit en parlait comme si les personnes qui utilisaient ces ingrédients en abusaient et ne savaient pas ce qu’elles faisaient. Or, de mon expérience, les personnes qui tentent ce type de molécules sont plutôt des personnes qui s’informent bien et/ou qui ont eu une prescription médicale avec des recommandations d’un médecin quand à l’utilisation des produits. Bien sûr il y a toujours des exceptions qui confirment la règle mais je ne pense pas qu’elles soient majoritaires.
Je trouvais donc que les exemples qu’elle employait dans l’article étaient vraiment outranciers et exagèrés (certainement pour attirer les lecteurs).
Perso, j’ai plutôt l’impression que ces molécules utilisées à bon escient (si on les supporte évidemment) ont plutôt de très bon résultats sur le très long terme. Pour le rétinol, par exemple, ça reste quand même la molécule la plus efficace actuellement pour un effet anti-âge selon les médecins dermatologues, et ce depuis plusieurs dizaine d’années. Après, je suis aussi partisane d’une très bonne prévention (avec produit solaire tous les jours). C’est encore le meilleur moyen de ralentir l’inévitable ?